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  • voiliershazzan

Premiers pas en Afrique... Easy ! Easy !

A midi le 12 décembre 2021, nous posions l’ancre près de la jetée des pêcheurs de la rade de Banjul.


Nous avons redoublé de vigilance pour la navigation d’approche car la carte indiquait « numerous wrecks », nombreuses épaves, ce qui n’est pas mentir car les pélicans ont l’embarras du choix pour choisir un perchoir parmi les bouts de ferraille, de mats et les coques rouillées qui émergent à marée basse comme à marée haute.



Nous nous sommes donc faufilés entre les hauts fonds, les barques et les filets de pêcheurs, les épaves... Et cette fois, ça y est, nous sommes en Afrique avec pour Dominique une joie profonde de retrouver ce continent qui l’a tant marqué quand il l’a découvert il y a 25 ans et pour Christine un mélange d’excitation et d’appréhension...



La Smiling Coast, le sourire de l’Afrique

La Gambie, le sourire de l'Afrique de l'Ouest

Dès l’après-midi, nous avons entamé les formalités d’entrée (visas et douane) et nous sommes entrés de plein pied en Afrique... et cette Gambie chaleureuse, cette Gambie où le sablier du temps oublie son rythme métronomique, nous a envouté dès les premières minutes ! Cette Gambie, où quelle que soit la couleur de ta peau, si des cheveux blancs surplombent un sourire, tu deviens Mama Africa et Papa Africa !



Croyez-nous, ce n’est pas pour rien que la Gambie est surnommée « The smiling Coast » (la côte souriante) car un sourire éclaire le plus souvent les visages des Gambiens vivant pourtant dans l’un des pays les plus pauvres au monde ; de plus, si vous regardez bien une carte de l’Afrique de l’Ouest, vous verrez que même le pays est comme le sourire de l’Afrique.


Nous avons ressentis très vite qu’un lien fort se tissait avec ce pays, un pays et un peuple qui vous interpellent, bouleversent vos certitudes, vous apportent d’autres lunettes pour voir le monde... un pays d’où nous repartirons changés à jamais...


1ère expérience : le débarquement et les formalités

Pavillon jaune hissé, nous partons en annexe vers la terre ferme

La première des choses à faire en termes de formalités est de hisser le pavillon Q, un pavillon jaune que l’on place dans les haubans à tribord. Il indique aux autorités que le navire et ses occupants demandent l’entrée dans le pays. La lettre Q est utilisée car elle signifie dans ce cas « quarantaine », une pratique venant du temps où chaque navire était soumis à une quarantaine à son arrivée dans un pays.


Une fois notre pavillon Q hissé, nous avons embarqués tous les 5 dans l’annexe, muni des originaux et de plusieurs photocopies de tous nos papiers : passeport, carte jaune internationale de vaccination, pass sanitaire et tous les documents pour dédouaner notre chargement de prothèses. Une organisation carrée... un truc d’européen quoi !


Mais comment Christine va-t-elle pouvoir débarquer ?

Chacun de nous scrutait les pontons pour voir où nous pourrions débarquer... Là-bas, là-bas, je vois un ponton flottant... Nous voilà amarré au quai en béton, un quai encombré d’un fatras de filets de pêche, de têtes de poisson à l’œil plus que vitreux et portant quelques traces noires de charbon de bois consumé...

Un petit air penché, le ponton ?

Au bout du quai, le ponton, car il y avait bien un ponton flottant comme on en trouve en Europe, mais à y regarder de plus près, le ponton avait comme un air penché, il était retenu par des gros bouts et il fallait enjamber un espace pour passer du quai au fameux ponton, espace dont la largeur fluctuait avec la marée... Ça ne va pas le faire pour Christine !


1er contact avec des militaires tout sourire... étrange, non !

Nous nous mettons donc en quête d’un autre endroit pour débarquer et nous trouvons un quai où sont amarrés 3 bateaux militaires, quai d’une certaine hauteur (voire d’une hauteur certaine) mais quai qui présente le gros intérêt d’être muni d’une échelle...


Les assistants ponton : militaires et lampadaire horizontal

Des militaires sont spontanément venus nous aider, ponctuant leur intervention avec des Easy, Easy, dont nous comprenons qu'il s'agit de l'encouragement local, à la fois bienveillant et sympathique...


Grace à leur aide et à celle d’un lampadaire bizarrement en position horizontale, Christine est arrivée sur le quai dans un élégance que nous qualifierons de remarquable !


1er contact donc, les militaires : ils sont souriants, ne sont pas armés et de plus très aimables, ils nous demandent d’où nous venons, comment nous nous appelons, le tout en anglais car ici pratiquement tout le monde parle Anglais (le pays a été sous domination anglaise dans le passé).


A la rencontre de Bob, le rastaman

Nous nous dirigeons vers la guérite du gardien du port accompagnés de nombreux jeunes hommes qui tchatchent avec nous et même nous prêtent leur téléphone pour que nous joignions Bob, un représentant gambien de Legs4Africa qui travaille au centre de mobilité de l’hôpital de Banjul, la structure destinataire des prothèses. Le gardien du port examine nos passeports, note nos noms sur l’un de ses cahiers et nous propose des chaises dehors à l’ombre pour attendre le fameux Bob... Les jeunes hommes sont toujours là et la discussion va bon train, une jeune fille arrive, nous propose d’acheter ses fruits puis elle s’assoie près de nous et s’endort tranquillement... Zen...

Bob (un rasta qui cachent ses très longues dreads de plus de 20 ans, sous un grand couvre-chef dont je vous laisse deviner les couleurs) arrive accompagné de Tom le responsable de Legs4Africa qui est venu tout exprès de Bristol. Une fois les salutations et présentations faites, nous partons en voiture vers les services de l’immigration.


Une première petite étape pour prendre la température... mais pas la nôtre

Nous voilà arrivés au service de l’immigration... fermé, normal nous sommes un dimanche. Bob descend, va parler à des personnes et nous voilà repartis... pour un autre service de l’immigration cette fois dans l’enceinte du port de commerce.


Un bâtiment, des portes masquées de rideaux de tissus jaunes... Nous poussons le rideau et nous retrouvons directement dans une petite pièce climatisée avec deux bureaux, une télé qui retransmet un match de foot et le personnel ainsi qu’un militaire qui la regarde... On nous fait assoir et on attend, on nous sourit en nous faisant des petites blagues... Bob parle avec le personnel, passe un coup de fil, l’officiel en passe un aussi et on attend en regardant le match... on attend et finalement on nous fait remplir un papier et on nous annonce que la suite sera pour demain, car le service de contrôle sanitaire est fermé...


Donc en résumé, on a dû passer environ 2 heures pour remplir un formulaire de quelques lignes qu’il faudra chercher un certain temps le lendemain matin en farfouillant dans pas mal de tiroirs...


3 jours pour les formalités... Ça va, non ? Oui, nickel !

Le lendemain, Bob nous attend comme la veille, avec son 4x4 équipé d’un gyrophare (on ne sait pas s’il fonctionne!) et nous voilà repartis pour le bureau de l’immigration. La télé, cette fois-ci, est sur France 24 en français et les deux bureaux sont occupés par deux gambiennes dans leur uniforme jaune moutarde et brun et l’une est manifestement la cheffe du bureau.


Nous avons constaté que les femmes étaient très présentes dans la police et les administrations avec assez souvent des positions de cheffes, position acceptée semble-t-il car le jeune homme à qui la cheffe a demandé de remplir son pot de sucre pour le thé s’est exécuté sans moufeter en piochant dans le sac de 10 kg casé sous une chaise !


Mais revenons à nos formalités dont je vais vous passer le détail mais dont on peut comprendre le déroulement en répétant et mixant de nombreuses fois les séquences suivantes :

  • Les séquences « On attend » : on attend que le chef ait fini de manger, on attend que quelqu’un revienne, on attend sans savoir pourquoi, on attend car il faut un papier de l’hôpital, on attend car il faut un document pour le dédouanement, on attend car le dit-document doit être fait par un agent maritime...

  • Les séquences « On change de bureau » : on va voir le bureau de la santé (où on nous prend la température et vérifie nos pass sanitaires), on retourne à l’immigration, on va au ministère, on va aux services des douanes, on va chez l’agent maritime... On retourne à l’immigration, au ministère, chez l’agent, aux douanes... et ainsi de suite

  • Les séquences « On téléphone » : Bob téléphone, le service de l’immigration appelle je ne sais qui, Bob appelle l’hôpital, l’immigration appelle le ministère qui appelle les douanes qui appelle l’agent, qui appelle l’immigration...



Le precieux sésame pour naviguer sur le Fleuve Gambie

Enfin bon, il nous a fallu 3 jours... Vous pensez que nous nous sommes énervés !!!! Et bien absolument pas car nous avons toujours été accueillis avec le sourire et nous comprenions que chacun faisait au mieux car c’était la première fois qu’un chargement de prothèses arrivait par la mer et personne ne savait trop comment faire !


En tout état de cause, heureusement que Bob était là pour nous piloter.



Un grand merci aussi à Dominique qui connaissant à la fois les procédures de dédouanement et le fonctionnement des administrations en Afrique de l’Ouest, nous a rassurés en nous affirmant que tout se passait normalement.



Banjul ou l’art de la cohabitation joyeuse

Ces 3 jours de formalités ont été l’occasion de découvrir Banjul. Cette ville, la capitale du pays compte 450 000 habitants dans un pays d’un peu plus de 2 millions. Une ville où l’on se partage la rue dans un concert de klaxon, une ville où les différentes cultures semblent cohabiter dans le respect des différences...


La rue pour tous à coup de klaxons

La rue est investie par tous, les piétons bien sûr mais aussi les animaux, les deux-roues, les voitures parmi lesquelles de nombreux taxis jaunes et verts, des taxis-brousse, des tuk-tuk... Circulent aussi dans les rues des brouettes qui servent au transport des courses pour ceux qui les hèlent et même des charrettes tirées par des ânes.

Pas de panneaux « Cassis ou dos d’âne », il en aurait fallu probablement beaucoup trop pour indiquer tous les nids de poule de la route...


Si les voitures des élites de l’administration sont facilement reconnaissables car très récentes et dotées d’une plaque explicite, la plupart des camions et voitures ne passeraient surement pas le contrôle technique en Europe : des remorques 3 essieux qui roulent avec 5 roues, des sièges tellement avachis qu’on ne voit que la tête du passager, des moteurs poussifs, odorants, cliquetant ou grondant selon les cas, des carrosseries avec cabosses multiples plus ou moins rouillées... Mais une chose est certaine, c’est que les klaxons fonctionnent à merveille car la circulation entre les engins motorisés, les vélos, les brouettes, les animaux et les piétons se fait à l’oreille, à l’œil et avec un brin de culot...


Ici, pas de constat amiable ! Nous avons rencontré inopinément et d’un peu trop près un camion qui sortait du stationnement, les deux conducteurs sont sortis, ils ont regardé les dégâts, juste de la tôle froissée donc tout va bien et les excuses du chauffeur poids-lourd ont suffi pour clore l’affaire d’une poignée de main sans un nom d’oiseau ou haussement de ton !


Des policiers non armés

Quelques policiers et policières facilitent le trafic dans les carrefours stratégiques. Contrairement à la plupart des pays occidentaux, les policiers ne sont pas armés et peut-être convient-il de le rapprocher du fait que le pays est sorti de 40 ans de dictature il y a tout juste 5 ans, une dictature dans laquelle la police a commis des exactions inqualifiables... D’ailleurs parmi les panneaux de messages officiels que l’on voit le long des grandes artères, celui-ci a retenu notre attention « La police n’est pas au-dessus des lois ».


Un policier nous a dit que la police était peu nombreuse et que de ce fait, ils essayaient d’être en bons termes avec les citoyens pour avoir l’occasion de savoir ce qui se passe.... Selon lui, la population ne considèrerait pas cela comme de la délation mais comme un civisme contribuant à faire de Banjul une ville sure même avec peu de police.


Une ville aux mille et un commerces...

On ne compte pas le nombre de commerces et d’échoppes : vêtements, tissus, bric-à-brac, chaussures, coiffeur... sans oublier l’incontournable Africell qui vend les cartes de téléphone.

Pour les vêtements, on trouve tous les styles, neufs ou recyclés ! Quant aux chaussures, sachez que claquettes et tongs équipent plus de 50 % des pieds gambiens !


Sur les trottoirs, des femmes vendent légumes, fruits, poissons séchés ou frais, mais dans ce dernier cas ils sont agrémentés de quelques mouches qu’elles chassent d’un revers de main.


D’autres font griller sur des braséros des arachides mêlées à de la terre afin de les torréfier sans bruler les coques tandis que des hommes proposent de cirer vos chaussures...


En ce moment, c’est la saison des pastèques qui sont juteuses à souhait et des fruits de baobab que l’on nous a conseillé de prendre en décoction pour soulager les maux de ventre... Pourtant sont aussi proposés de nombreux fruits importés comme des pommes et des oranges de couleur orange qui viennent du Maroc (les oranges locales sont vert-jaune). Dommage, ce n’est pas la saison des mangues.


Plusieurs religions, plusieurs ethnies, 7 langues mais une seule nation

Sachez qu’en Gambie, tout comportement discriminant une religion ou ethnie mène tout droit à la case prison...


Pour donner quelques exemples concret, on comprend vite en regardant les femmes dans la rue que les différentes religions cohabitent sans problème car on croise des femmes voilées (le voile allant du hijab au niqab), des femmes en robes colorées bras dénudés et des jeunes femmes en jean débardeur...


Autre exemple, quand on nous sommes allés dans un village plus reculé, le maître d’école que nous avons rencontré nous a expliqué que dans son village, il n’y avait qu’une mosquée mais que les villageois chrétiens disposaient d’une église dans le village voisin, non sans ajouter que tous, chrétiens ou musulmans fêtaient ensemble Noël et l’Aïd... De quoi réfléchir et faire réfléchir, non ?


Des enfants qui jouissent d’une liberté qu’envieraient nos écoliers

Les enfants sont nombreux, joyeux et bondissants... Ils débordent d’énergie, ils ont une force de vie impressionnante !

Les routes de terre battue que l’on trouve dès que l’on sort des artères principales sont le royaume des enfants de tous âges... Même les plus petits y jouent sans être surveillés par des adultes et il semble qu’ils intègrent tout jeune le principe selon lequel il faut s’éloigner au moindre klaxon !


Ces routes à la poussière rouge qui s’envole au moindre souffle se transforment en terrain de foot pour les minots qui s’en donnent à cœur joie en tentant de viser les buts marqués par des pierres ou des bidons...


On croise aussi des jeunes garçons et filles qui vont ou reviennent de l’école en uniforme, robe à carreaux bleus et blancs, ensemble jupe/chemisier ou short/chemise bleus marines, verts ou beiges, l’uniforme (toujours d’une propreté impeccable ce qui est remarquable vu la poussière) variant selon l’école fréquentée.


Les toubabs seraient-ils naïfs ? Nous ne le croyons pas !

Quand les enfants courent auprès de la voiture en lançant « Toubab, toubab » nous n’avons jamais ressenti ce vocable qui signifie « blanc » comme péjoratif ou agressif. En Gambie, les gens viennent vers vous, vous disent bonjour et entament la conversation, d’où viens-tu, quel est ton nom.... Toujours avec le sourire et cela nous rappelle combien en France nous avons oublié cette convivialité, cette joie de vivre et cette envie d’aller vers l’autre, même s’il est différent.


Bien sûr, nous savons bien que certains espèrent aussi récupérer quelques Dalassis ; peut-être sommes-nous naïfs, mais nous n’avons pas eu l’impression que l’appât du gain était la motivation première... Nous n’avons pas vu de mendiants et le principe est plutôt que les gens vous rendent un menu service et que vous les remerciez par un billet de quelques dizaines de Dalassis (100 Dalassis = 2 euros). Nous n’avons croisé que quelques pots de colles fatigants, mais la plupart du temps les personnes n’insistent pas ou peu si vous leur dites non...


Ce n’est pas un exercice évident pour nous européens tout comme le marchandage car de fait aucun prix n’est affiché et nous n’avons aucune idée des prix pratiqués généralement... Personnellement, nous avons bien volontiers accepté de payer sûrement un peu plus cher que les locaux... ce qui semble la moindre des choses vu la différence de niveau de vie.


Une énergie positive et communicative

Nous nous sommes sentis tout de suite à l’aise ici et Christine était totalement zzzzzzen, seule assise dans la voiture, la porte ouverte, le téléphone sur les genoux en pleine ville, se sentant plus en sécurité que dans certains quartiers urbains français...


Il se dégage une énergie puissante, positive et communicative qui vous touche au cœur, les gens viennent vers vous, vous sourient, vous parlent, vous proposent leur aide...


Oui, ce pays nous change, il ouvre des brèches dans notre rapport au temps, il nous prouve que l’on peut vivre ensemble sans faire cas des différences ethniques ou religieuses, il jette un pavé dans la mare des idées préconçues sur l’Afrique que certains politiques s’emploient à propager pour protéger leur tour d’ivoire...


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